Quel que soit notre âge, si nous sommes nés en France, nous avons peu ou prou bénéficié de la même instruction.
Vous savez ? l'Instruction nationale... que la généreuse république nomme éducation... alors que l'éducation est l'affaire des parents, à tel point que, soyons nous riches ou pauvres, fils de cultivateurs, d'ouvriers ou de fonctionnaires, catholiques ou non, nous n'avons pas reçu la même éducation.
L'instruction, oui. Celle que le gouvernement d'aujourd'hui voudrait compléter par des cours de morale laïque, qui hier nous apprenait que la France, devenue soucieuse de son Peuple en 1789 après que les Rois et les seigneurs aient joué à la guerre féodale pendant des siècles, celle donc qui nous apprit que l'air que nous respirons est une valeur républicaine.
L'instruction, donc, nous apprit que la France est une république (alors que la France est un pays gouverné aujourd'hui par un régime républicain) et qu'elle est donc - n'est-ce pas évident ? - une démocratie, ce qui permet à chacun de nous de choisir selon son opinion.
Il est d'ailleurs amusant de constater que, plus l'on insiste sur les caractéristiques d'une république, plus elle s'en éloigne : république démocratique de ceci, république populaire de cela... autant de dictatures nées d'autant de révolutions ! La France, elle, est d'abord nommée comme république (sans qualificatif, ouf !), avant d'être la France, mais cette république a des valeurs (là aussi sans qualificatif... on suppose donc qu'elle possède toutes les valeurs qui méritent d'être vantées, aucun des défauts qu'il convient d'enfouir, mais comme tout cela n'est pas listé, il faut bien que nous ayons tous les mêmes valeurs !).
C'est un écueil, et de taille ! La démocratie, oui, mais à condition que nous soyons tous d'accord...
J'exagère ? mais non... quelques exemples : la constitution européenne, rejetée par referendum, et adoptée l'année suivante par l'Assemblée après quelques retouches ; l'élection présidentielle, où il est convenu que le 2ème tour départagera deux candidats partant favoris, quel scandale si un outsider prend la place de l'un d'eux ; une pétition de 700 000 signatures adressée au CESE et jetée à la benne...
Donc en France, la démocratie qui, d'un côté ne paraît pas chaque jour menacée, de l'autre ne permet pas à ceux qui s'expriment d'être entendus. Ajoutez à cela une bonne dose de problèmes de la vie quotidienne, et les Français se désintéressent du sujet, et donc de la politique, objet de la démocratie.
Sauf s'ils sont devant la télévision, où il est possible de s'exprimer sans être contredit et de monter le son si l'on veut crier.
Bouclons la boucle : la république (res-publica, la chose publique) a réussi ce tour de force de détourner les citoyens de la politique.
Au point que même, à l'occasion de la féroce opposition d'un très grand nombre au "mariage pour tous", réforme qui attaque de plein fouet la cellule familiale, base de notre Société, et donc réforme par essence politique car tout ce qui touche à la Société est évidemment de nature politique, le mot d'ordre impératif est "nous sommes un mouvement a-politique, surtout, pas de politique".
Sans cela, cette masse de citoyens appartenant pour leur grande majorité, n'en doutons pas, à ce qui s'appelait la "majorité silencieuse", risquerait fort de rester à la maison...
...tellement la politique est sale, et mérite de n'être confiée qu'à des ambitieux aux activités parfois douteuses qui monopolisent les média.
Alors, moraliser la vie politique ? C'est un peu comme quand on annonce une baisse d'impôts : on peut être sûrs qu'ils augmenteront et on voudrait crier : "non, surtout, n'y touchez pas".
Et nous, nous voudrions crier "laissons tomber la république, relevons la France avec la monarchie" !!
Vive la France, vive le Roi.