Entretien avec Patrick de Villenoisy
Nous recevons aujourd’hui Patrick de VILLENOISY, porte parole de l’Alliance royale, pour un entretien évoquant le royalisme, le projet royaliste, la division qui frappe le royalisme. . .
GENERATION FA8 : Bonjour. Tout d’abord serait-il possible que vous vous présentiez à nos lecteurs ne vous connaissant pas encore ? De même pourriez-vous nous décrire rapidement votre parcours intellectuel et politique ?
Je suis né à Lille où j’ai passé les 30 premières années de ma vie. J’y avais entamé, sans les terminer, des études de médecine jusqu’à la troisième année.
Je suis devenu ensuite analyste financier et me suis installé à Paris où j’ai exercé cette activité pendant 25 ans comme consultant indépendant. Depuis 5 ans j’ai entamé une activité dans l’événementiel d’entreprises en créant ma propre structure.
Je me suis intéressé depuis toujours à la politique et me suis dès le départ senti royaliste. Néanmoins, j’ai fait un court passage au CNIP du temps du ministre Philippe Malaud.
GENERATION FA8 : Yves-Marie ADELINE a cessé son militantisme politique. Il a dirigé l’Alliance royale un certain temps. Avec le recul, comment jugez-vous son action en tant que président de ce mouvement ? Est-ce que vous seriez d’avis qu’il revienne, d’une façon ou d’une autre, à la réflexion et à l’action politiques ?
Yves-Marie Adeline est le président fondateur de l’Alliance royale et c’est lui qui a eu l’idée de créer cette formation sur la base d’un certain nombre de constats.
Premier constat : les royalistes sont marginalisés et inexistants dans le concert politique. J’en veux pour preuve que dès que sur une question quelconque un président de la république veut consulter les forces politiques du pays, il convoque tout le monde de la gauche à la droite mais pas les royalistes. C’est le premier résultat tangible de notre action que d’avoir été consultés par la commission Présidée par Monsieur Balladur sur la réforme des institutions.
Deuxième constat : les royalistes sont divisés entre différentes fidélités dynastiques. Le propos de l’Alliance royale était et continue d’être de les rassembler dans une action politique indépendamment de ces différences et donc de ne pas traiter du sujet du Prince.
L’Alliance royale est donc dans l’esprit d’Yves-Marie Adeline une stratégie politique mise à la disposition des Royalistes.
Troisième constat (plus politique) : le système des partis confisque la démocratie à son seul profit.
Sur le second point de votre question ; Yves-Marie Adeline a décidé de se retirer de la direction de l’Alliance royale pour se consacrer à son devoir d’Etat : pour ceux qui l’ignoreraient, il est père de huit enfants.
Je pense par ailleurs qu’il est un homme de réflexion, un grand universitaire et qu’il préfère se consacrer à l’écriture de ses livres. Il n’abandonnera donc pas cet aspect des choses mais ne reviendra pas vers des responsabilités à l’Alliance royale dans un avenir proche.
GENERATION FA8 : Le royalisme selon nous se présente comme une excellente idée. Cependant, il faut considérer que politiquement parlant les choses se montrent plus compliquées. Il existe un nombre important de mouvements, d’associations, de cercles etc, royalistes, qui ne travaillent pas forcément en synergie, voire qui ont tendance à se taper dessus. Comment les Français peuvent-ils se retrouver dans ces mouvements royalistes ?
Vous avez raison dans votre premier constat et ce n’est donc pas moi qui vous contredirai.
Plus sérieusement, je pense que les choses évoluent dans le bon sens et je crois que le temps des divisions est en train de disparaitre. Ce n’est pas un hasard si j’ai cité cette phrase du Christ lors de mon intervention le soir des commémorations de Jeanne d’Arc : tout royaume divisé contre lui-même se perdra.
Il y a actuellement beaucoup d’échanges et de contacts entre les différents mouvements et associations. Ce travail de rapprochement et de dialogue doit continuer et il est à la base de notre réussite.
Les Français viendront vers nous quand nous seront devenus une force politique crédible, capable de représenter un recours dans l’anarchie actuelle.
GENERATION FA8 : La question du prince demeure fondamentale. Cette question empoisonne les milieux royalistes. Comment la régler définitivement ? En choisissant un prince ? En écartant la question du prince pour se contenter de défendre et faire connaître le principe monarchiste ?
J’ai déjà un peu répondu à cette question : pour l’Alliance royale, le choix est fait : nous écartons la question du prince pour faire de la politique et présenter une plateforme politique crédible qui montrera notre capacité à prendre en mains la destinée de notre pays.
Note de l'auteur du blogue : la question du Prince ne peut pas être évoquée dans la phase actuelle de la réapparition des Royalistes dans la vie politique de notre pays. En effet, les Royalistes sont encore divisés entre eux, comme l'entend bien la question. Il ne serait pas la place du Roi de participer à une campagne de conquête de son trône, comme le fait un candidat à la présidence de la république. Il est en revanche du devoir des Royalistes de s'entendre entre eux pour permettre aux Princes de s'unir un jour derrière le Roi incontesté, lorsque le temps sera venu de changer les Institutions.
GENERATION FA8 : En 2007 Yves-Marie ADELINE avait tenté de se présenter à l’élection présidentielle. En 2012 est-ce que l’Alliance royale présentera un candidat ?
Le bureau politique n’a pas encore pris de décision sur ce sujet. Nous étudions préférentiellement le fait de présenter des candidats aux législatives car, comme vous le savez, c’est de ce scrutin que dépend dorénavant le financement des partis politiques. Il faut donc avoir des candidats dans suffisamment de circonscriptions pour accéder à ce financement.
Notre but étant dans un premier temps de rendre visibles les royalistes dans le débat politique, il n’est donc pas exclu que nous présentions un candidat qui n’aurait aucune chance d’être élu mais qui participerait à cette politique de visibilité du royalisme.
GENERATION FA8 : Des personnes, très souvent royalistes, expriment l’idée que la République est le parti de l’étranger. Pensez-vous la même chose ?
Je pense que c’est un peu exagéré de dire cela mais il est certain que seul un Roi peut être le garant de notre indépendance et de notre souveraineté.
GENERATION FA8 : D’une manière générale comment comptez-vous vous y prendre pour développer et pérenniser le principe monarchiste auprès des Français ? Ces derniers, abreuvés de propagande républicaine peuvent-ils être encore sensibilisés et attirés par le royalisme ?
Il est un élément dont il faut tenir compte. Les Français s’abstiennent de plus en plus dans les différentes élections. Contrairement à ce qu’en disent les hommes politiques, c’est le signe qu’ils ne leur font plus confiance, qu’ils sont désabusés et qu’ils ne savent plus à quel saint se vouer. De fait, le peuple français domestiqué par les politiques et abêti par le matérialisme n’espère plus grand’chose de sa république. Les statistiques ou les résultats ne tiennent pas compte de ceux qui ne sont même pas inscrits tellement ils sont dégoutés par le système actuel. Le système actuel a organisé la confiscation de la démocratie : c’est notre constat de départ. Pour beaucoup de nos concitoyens, choisir entre la droite et la gauche est à peu près aussi efficace que de choisir de changer de cabine sur le Titanic.
Ce ne sont pas les partis qui servent à droite comme à gauche à faire des votes de protestation qui peuvent représenter un avenir pour la France.
On ne pourra pas faire l’économie du retour à la royauté pour sauver notre pays de la décadence. Il faut en être persuadé et c’est notre mission d’en persuader nos concitoyens.
Dès lors, nous seront perçus comme le seul recours.
GENERATION FA8 : Le dimanche 9 mai 2010 a vu plusieurs défilés en l’honneur de Jeanne d’Arc. Cela prouve d’une certaine façon la vitalité de notre combat. Ne serait-il pas temps que les catholiques et les patriotes défilent de manière unitaire, les prochaines années, dans un souci d’efficacité ?
Vous avez bien compris que je suis pour l’unité. Je pense en effet que les catholiques doivent comprendre que la seule institution valable pour la France est la monarchie.
L’enseignement de sainte Jeanne d’Arc est bien celui-là. Elle a voulu le retour de son « Seigneur ». Qui était le Seigneur pour Jeanne d’Arc : c’est le vrai et seul Roi de France : le Christ. Et le futur Charles VII dans tout cela ? Il est son lieutenant.
Et le Christ Lui-même quand Il était interrogé ? Il répondait systématiquement qu’Il était Roi.
GENERATION FA8 : La France peut-elle encore se sauver ? Comment pourra-t-elle se redresser alors que les attaques de ses ennemis s’amplifient quotidiennement ?
Oui, la France peut se sauver, elle doit revenir à l’Institution qui peut seule le réaliser et nous ne pouvons pas faire l’économie de ce retour. Comme je l’ai dit lors de mon intervention, toute autre voie représenterait un travail de Sisyphe. Seule l’institution de la monarchie est pérenne.
GENERATION FA8 : Quel sera votre mot de la fin ?
Nous devons travailler à dessiller les yeux de nos concitoyens. Nous sommes la jeunesse de France.
je voudrais rappeler à vos lecteurs ce qu’écrivait Bossuet :
Il y a un abandon à Dieu qui vient de force et de piété. Il y en a un qui vient de paresse ; s'abandonner à Dieu sans faire de son côté tout ce que l'on peut c'est lâcheté et nonchalance. Ce n'est pas en vain que Dieu nous a donné une sagesse, une prévoyance et une liberté. Il veut que nous en usions. Ne pas le faire et dire en son cœur : j'abandonnerai tout au hasard et croire qu'il n'y a point de sagesse parmi les hommes sous prétexte qu'elle est subordonnée à celle de Dieu, c'est disputer contre Lui, c'est vouloir secouer le joug et agir en désespéré.
Et qu'on ne me dise pas que, si la défaite est certaine, la lutte est inutile; en premier lieu, la lutte peut atténuer, adoucir la catastrophe et, en second lieu, pour nous qui nous faisons gloire d'être catholiques, la lutte est l'accomplissement d'un devoir, et non le résultat d'un calcul. Remercions Dieu de nous avoir octroyé le combat, et ne demandons pas, en sus de cette faveur, la grâce du triomphe à Celui dont l'infinie bonté réserve à ceux qui combattent généreusement pour sa cause une récompense bien autrement grande et précieuse pour l'homme que la victoire d'ici bas.